Accra, Ghana (PANA) – Cela fait plus d’un demi-siècle que le continent africain a commencé à se libérer du fléau du colonialisme. Le Ghana, mon pays, a dirigé ce mouvement vers la libération en devenant la première nation d’Afrique subsaharienne à obtenir son indépendance. Aujourd’hui (jeudi 06 mars) marque le 57ème anniversaire de cette occasion”.
Aux douze coups de minuit quand l’ancienne colonie britannique de la Gold Coast est devenu le Ghana, le Dr. Kwame Nkrumah, notre premier président avait annoncé: “Enfin la bataille est terminée. Le Ghana, votre pays bien-aimé, est libre pour toujours”.
Mais la souveraineté ne garantit pas l’auto-suffisance et le rejet de la domination est un effort de longue haleine – surtout si vous êtes un pays pauvre riche en ressources.
Néanmoins, le Ghana et l’Afrique dans son ensemble, ont fait des progrès importants. Nous avons arrêté le cycle des dictatures récurrentes et placé notre confiance dans la stabilité que la démocratie et le respect de l’Etat de droit procure. Nous renforçons systématiquement nos institutions pour assurer que le développement se poursuivra à une allure acceptable, sinon rapide. Mais ceci est-il véritablement suffisant?
Pendant un moment, on a pu le croire. A la fin de l’année 2012, le Fonds monétaire international (FMI) avait publié des Perspectives Economiques Mondiales dans lesquelles il prédisait la croissance économique de 185 pays. Sur la base de ces estimations, 10 des 25 pays, dont les prévisions de croissance annuelle de 2013 à 2017 étaient les plus élevées, se trouvaient en Afrique sub-saharienne.
Ainsi on a commencé à se réjouir. Les affaires sont devenues florissantes! Il y a eu des conférences, des discours, des communications et des articles consacrés au thème de “l’Afrique montante”. Le “Continent Noir” comme on a l’habitude de le désigner avait réussi à retrouver le chemin de la lumière!
Cependant, il est bientôt apparu que les chiffres positifs sur le papier ne se traduisaient pas en faits concrets dans la vie des populations africaines. La croissance dont nous nous vantions ne se traduisait pas en emplois suffisants pour une population en pleine croissance. Ce qui était préoccupant.
La main d’oeuvre africaine augmente rapidement. Elle devrait passer à 1 milliard 100 millions d’ici l’année 2040, ce qui fait plus que celle de l’Inde et de la Chine.
Se pose également le problème de l’urbanisation. Il y a trente ans, 28% de la population du continent vivait dans les villes; de nos jours, sur 1 milliard de personnes en Afrique, 40% vivent en ville. Ce qui nous place à égalité, non pas demain, mais aujourd’hui, avec la Chine et l’Inde. Et dans 15 ans, ce chiffre va accroître de 50%.
Le Ghana, avec un taux de croissance record de son PIB de 14% en 2011, notre première année de production pétrolière, a été une de ces économies les plus performantes. Cette année, le PIB prévu est de 7,4%.
Notre croissance est toujours impressionnante et nos perspectives à long terme nous donnent raison d’être optimistes. Quoi qu’il en soit, imaginez si ce niveau de croissance avait été durable, si nous avions pu l’utiliser pour tirer plus de nos concitoyens de la pauvreté et restaurer nos infrastructures surexploitées.
Alors que nous célébrons la liberté dont nous jouissons depuis 57 ans, la liberté qu’apporte l’autosuffisance nous échappe encore. Le Ghana exporte de l’or, du cacao, du bois, divers minerais et très peu d’autres choses. Ce sont les mêmes produits que nous exportons depuis notre accession à l’indépendance.
Comme la majorité des nations africaines, le Ghana importe presque tout ce que notre population consomme, des télévisions aux cure-dents. Nous importons même des denrées que nous pourrions produire localement, comme le riz, le sucre, le blé, la volaille et la farine.
Il n’est donc pas surprenant que, pour importer, nous dépensions plus que ce que nous tirons des exportations. Ce qui signifie que nous sommes totalement à la merci de forces que nous ne contrôlons pas toujours. C’est une situation précaire… à laquelle nous devrions être habitués désormais.
L’Afrique semble en permanence au bord de la guerre, de la famine, de l’échec et, plus récemment, du succès. C’est peut-être la raison pour laquelle Dr. Nkrumah, avec son sens de la prémonition, nous a préparés à cette période que nous vivons.
“Dès maintenant”, disait-il, “nous devons changer d’attitude et de mentalité. Nous devons réaliser qu’à présent nous ne sommes plus une colonie, mais un Etat libre et indépendant”.
La prochaine phase de la transformation de l’Afrique doit commencer par la compréhension du fait que nos ressources naturelles ne sont pas la somme de notre valeur, comme on nous l’avait fait croire. Nous avons beaucoup à donner au monde et à nous-mêmes. Nous devons continuer à établir des partenariats avec le reste du monde et rester actifs sur la scène mondiale, mais nous devons également investir dans nos propres industries.
Plus nous serons en mesure d’investir dans nos économies, plus il nous sera facile de bâtir nos pays individuellement. Ce qui peut rendre l’Afrique véritablement triomphante, indépendante et libre.
Photo: African Green Revolution