African Press Organization (APO)/ – Près d’un tiers des étudiants en médecine et en soins infirmiers dans les pays en développement n’ont pas l’intention de travailler dans leur propre pays après l’obtention de leurs diplômes, tandis que moins d’un cinquième d’entre eux ont l’intention de travailler dans les zones rurales où ils sont le plus nécessaires, selon une nouvelle étude.
Les pénuries de travailleurs de la santé ont été un facteur majeur de l’épidémie actuelle du virus Ébola en Afrique de l’Ouest. La maladie s’est propagée d’abord rapidement dans les régions rurales de trois pays comptant parmi les plus pauvres du monde (la Guinée, la Sierra Leone et le Libéria), où le nombre de travailleurs de la sénté est très faible.
L’étude, qui est publiée dans le Bulletin de l’Organisation mondiale de la Santé aujourd’hui, fournit de nouvelles preuves étayant les recommandations de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) relatives au recrutement et à la rétention des travailleurs de la santé dans les zones rurales, y compris l’admission ciblée des étudiants en médecine et en soins infirmiers d’origine rurale.
«Des investissements considérables ont été réalisés ces dernières années pour développer la formation du personnel de santé dans les pays à faible revenu et les pays à revenu intermédiaire», a déclaré le principal auteur de l’étude, le Dr David Silvestri du Brigham and Women’s Hospital and Massachusetts General Hospital à Boston, aux États-Unis d’Amérique.
«Malheureusement, nous n’avons pas accordé suffisamment d’attention au recrutement des étudiants les plus susceptibles de travailler dans les zones rurales, où les besoins en matière de santé sont les plus importants. En conséquence, une proportion importante de ces investissements accrus peut être utilisée pour former des personnes qui n’aspirent qu’à émigrer après leur formation.»
De 2011 à 2012, le Dr Silvestri et ses collègues ont interrogé 3199 étudiants de première année et de dernière année de médecine et de soins infirmiers inscrits dans les 16 plus grandes écoles de médecine et de soins infirmiers gérées par le gouvernement dans 8 pays: le Bangladesh, l’Éthiopie, l’Inde, le Kenya, le Malawi, le Népal, la République-Unie de Tanzanie et la Zambie.
Cette étude est importante car il s’agit d’une étude plurinationale (où les données ont été recueillies et analysées dans plusieurs pays différents) qui suggère, pour la première fois, qu’il existerait une tendance similaire dans les futurs objectifs de carrière des étudiants en médecine et en soins infirmiers dans les différents pays et dans plusieurs régions.
Lorsqu’ils ont été interrogés sur le lieu où ils avaient l’intention de travailler dans les 5 ans suivant l’obtention de leur diplôme, 28% des étudiants interrogés comptaient chercher un emploi à l’étranger, alors que seuls 18% des étudiants prévoyaient de choisir une carrière dans les zones rurales.
«Nous avons constaté que les étudiants qui avaient grandi dans les zones rurales étaient les plus susceptibles de vouloir poursuivre une carrière en milieu rural, et qu’ils étaient les moins susceptibles de vouloir partir à l’étranger», a déclaré Silvestri. «Nos données suggèrent que les intentions de carrière des étudiants peuvent être identifiées avant leurs inscriptions, ce qui signifie que les pays pourraient admettre sélectivement les personnes qui seraient les plus susceptibles de travailler dans les zones où les besoins sont grands.»
La gravité de la pénurie du personnel de santé dans les pays en développement constitue un obstacle majeur aux progrès de la santé mondiale, et a été identifiée pour la première fois par le Rapport sur la santé dans le monde de 2006: travailler ensemble pour la santé. Les pays d’Afrique subsaharienne ont en moyenne 2 médecins et 11 infirmières ou sages-femmes pour 10 000 personnes, contre 30 médecins et 84 infirmières ou sages-femmes dans les pays à revenu élevé, selon la Banque mondiale.
Pour remédier à la pénurie et la mauvaise distribution des travailleurs de la santé dans les pays en développement, l’OMS a créé l’Alliance mondiale pour les personnels de santé en 2006, un partenariat consacré à ces questions. En 2010, l’alliance a publié le Code mondial de pratiques pour le recrutement du personnel de santé de l’OMS, ainsi que des recommandations relatives au recrutement et à la rétention du personnel de santé dans les zones rurales, intitulées Améliorer l’accès au personnel de santé dans les régions éloignées et rurales par l’amélioration de la rétention.
Comprendre la motivation des élèves à travailler dans les zones rurales et renforcer l’orientation rurale des travailleurs de la santé sont deux tâches qui s’inscrivent dans un travail collaboratif permanent entre l’OMS, la Banque mondiale et l’Organisation internationale du Travail.
L’étude arrive à point nommé étant donné que le Code de pratiques mondial de l’OMS doit être examiné pour la première fois par le Conseil exécutif en janvier 2015, et que ses conclusions ont des implications politiques pour les pays qui s’efforcent à mettre en place la couverture universelle des soins de santé, selon James Campbell, Directeur du département des personnels de la santé au siège de l’OMS et le Directeur exécutif de l’Alliance mondiale pour les personnels de santé.
La rétention du personnel de santé est essentielle en cas d’urgence – comme nous pouvons l’observer dans l’épidémie actuelle du virus Ébola en Afrique occidentale. Nous devons repenser certaines des politiques visant à attirer la crème de la crème pour former et préparer ces étudiants à travailler là où ils sont le plus nécessaires», a déclaré M. Campbell.
«Sans une remise en cause de l’enseignement, du déploiement et de la distribution équitable des travailleurs de la santé, de nombreux systèmes de santé pourraient être menacés de fournir peu voire plus de soins aux populations rurales», a conclu M. Campbell.
Photo Credit: Acoustimac