Blantyre, Malawi (PANA) – Une vérification judiciaire financée par la Grande-Bretagne sur le pillage massif du Trésor public malawite, a révélé que plus de 13 milliards de kwachas (plus de 30 millions de dollars américains) ont été détournés par des hommes politiques, des hommes d’affaires et des fonctionnaires.
Cet audit, effectué par le cabinet d’expert-comptable britannique, Baker Tilly, couvre la période d’avril 2012 à septembre 2013.
Par coïncidence, la présidente Joyce Banda a accédé au pouvoir le 7 avril 2012, suite à la disparition brutale deux jours auparavant du président Bingu wa Mutharika, des suites des complications d’un arrêt cardiaque.
Ce scandale a été révélé en septembre de l’année dernière après la tentative d’assassinat du directeur du Budget du ministère des Finances, Paul Mphwiyo, qui menait alors une croisade contre la corruption au sein du gouvernement.
Quelques jours auparavant, un simple fonctionnaire avait été trouvé en possession de liasses de billets d’un montant total de plus de 300.000 dollars dans le coffre de sa voiture.
D’autres sommes en liquide ont également été saisies aux domiciles et dans les coffres de voiture d’autres fonctionnaires.
Les bailleurs de fonds du Malawi ont réagi en suspendant une aide de 150 millions de dollars qu’ils devaient apporter à ce pays en attendant les résultats d’une enquête sur ce scandale.
Près de 40 pour cent du budget annuel du Malawi sont financés par des donateurs.
D’après les conclusions de cette vérification judiciaire, des hommes politiques et des chefs d’entreprises ont, de connivence avec des fonctionnaires, infiltré le système de gestion financière du gouvernement. Ils avaient pour méthode d’effacer toutes les transactions après avoir encaissé les fonds détournés.
« Nous avons constaté des transferts de fonds entre des entreprises n’ayant rien à voir les unes avec les autres, des retraits de fonds par des individus sur des comptes d’entreprises avec lesquelles ils n’avaient aucun lien et des sommes exagérées versées à des entreprises sans qu’il en reste trace ou alors très peu », souligne le rapport.
Toujours d’après le rapport, certaines sociétés agréées depuis seulement le mois de mai 2013 ont commencé à effectuer des transactions avec le gouvernement dans le cadre de contrats portant sur plusieurs millions de dollars.
Certaines entreprises ont même été payées pour des biens et services non rendus au gouvernement.
Le rapport d’audit ne mentionne pas les noms des personnes et des sociétés impliquées dans ce scandale mais au moins 70 personnes comparaissent en ce moment devant les tribunaux pour répondre à des accusations de fraude et détournement liées à ce scandale surnommé le « cashgate » par la presse du Malawi.
Ce rapport, publié moins de trois mois avant que la deuxième femme chef d’Etat d’Afrique se présente pour être réélue en mai, est crucial pour la présidente Banda.
Selon une enquête de la Commission catholique pour la justice et la paix et l’Institut démocratique national (NDI), le « cashgate » jouera un rôle essentiel dans ces élections.
D’autre part, les organisations de la Société civile, sous la bannière de la Grande coalition, prévoient d’organiser des manifestations à l’échelle nationale ce jeudi pour protester contre le traitement de l’affaire du « cashgate » et la vente controversée du Jet présidentiel.
Des articles parus dans la presse indiquent que la vente (pour 15 millions de dollars) de cet appareil à une société des Iles Vierges ne peut être retracée puisque la transaction n’a pas été faite par le Compte Numéro Un de la Banque centrale comme c’est normalement le cas.
M. Mutharika avait procédé à l’achat controversé de ce Jet aux Etats-Unis pour 22 millions de dollars.
La Grande-Bretagne en signe de protestation avait réduit son aide annuelle de trois millions de dollars car Londres estimait qu’une partie de l’aide britannique avait financé l’acquisition de l’appareil.
A son accession au pouvoir, la présidente Banda avait promis de vendre le Jet car son entretien était trop coûteux.