Reeyot Aleemu reçoit « le Prix du Courage » pour avoir dénoncé le gouvernement éthiopien,

Par Isseu Diouf Campbell
Translated in French by Claire Dadies

La chroniqueuse éthiopienne Reeyot Aleemu était l’une des lauréates auxquelles l’International Women’s Foundations a décerné « le Prix du Courage en Journalisme » à New York cette année, les autres lauréates étant Asmaa Al-Ghoul de la Palestine et Khadija Ismayilova d’Azerbaïdjan.

En juin 2011, une semaine après avoir publié une rubrique critiquant le gouvernement éthiopien, la jeune femme a été arrêtée sans motifs.

« Les autorités ont fait une descente chez elle et se sont emparés de documents et autres matériels avant de la placer en garde à vue au centre de détention de Maekelawi à Addis-Abeba. En janvier 2012, un juge de la Cour suprême fédérale éthiopienne l’a déclarée coupable de conspiration en vue de commettre des attentats terroristes et d’association avec des groupes terroristes. Elle a été condamnée à une peine de 14 ans de prison, » a déclaré l’International Women’s Foundation.

Reeyot, ne pouvant se présenter à la cérémonie parce qu’elle est incarcérée en Éthiopie, Elias Wondimu qui l’a nominée et qui est l’un des 150 journalistes exilés, a lu sa lettre au public.

« Tirer sur le peuple qui défile réclamant liberté et démocratie, incarcérer les dirigeants des partis d’opposition et les journalistes seulement parce qu’ils portent un regard différent de celui du parti au pouvoir, empêcher les discours en faveur de la liberté d’expression, d’association et de presse, corruption et domination d’une tribu, sont quelques-unes des mauvaises actions de notre gouvernement. En tant journaliste qui pense devoir changer ces mauvais aspects, je préparais des articles contre ces injustices. Lorsque je l’ai fait, je savais que j’aurais à payer le prix de mon courage et j’étais prête à le faire parce que le journalisme est une profession à laquelle je veux me dévouer entièrement. » disait la lettre.

Elias Wondimu ne sait pas si le prix aidera à la libération de Reeyot, mais il croit qu’il s’agit d’un acte significatif.

« C’est un prix très important qui lui montre et lui dit qu’elle est appréciée, qu’elle n’est pas oubliée en prison et qu’on se souviendra d’elle pour son courage. Les femmes journalistes ne devraient pas être forcées de rester à l’écart du journalisme à cause des persécutions du gouvernement. Les attaques contre le journalisme ont commencé en 2005, après les élections. Depuis lors, la liberté d’écrire et de publier en Éthiopie a fortement diminué et la plupart des publications ont fermé. Le gouvernement a ajouté une clause sur le terrorisme dans le code de la presse, ce qui lui permet d’emprisonner toutes ces personnes. Pour avoir opposé le point de vue du gouvernement et pour avoir défendu un changement pacifique du système, Reyoot s’est retrouvée victime de ces pratiques. »

D’après Elisa Munoz directrice exécutive de l’International Women’s Media Foundation, la bataille, pour autonomiser les femmes au sein des médias, continue avec des femmes comme Reeyot.

« Si, parmi de nombreuses candidates, elle a finalement été choisie pour être l’une des trois femmes lauréates du prix, c’est parce que son histoire est extrêmement émouvante et captivante. Durant nos recherches, nous avons découvert que 38 femmes sont mortes dans la dernière décennie alors qu’elles faisaient leur travail de reporters. Comme les hommes, ces femmes sont souvent les cibles du gouvernement, mais aussi parfois d’autres personnes, pour tenter de révéler des informations qu’ils veulent garder secrètes. C’est ce que l’on a vu avec beaucoup de nos lauréates. Elles connaissent le danger, mais choisissent quand même de prendre le risque. ».

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